Régime de retraite à prestations définies : Sécurisation des rentes

3 Mar 2017

Retraite à Prestations définies (Retraite « Chapeau ») Les nouvelles dispositions prévues par l’ordonnance n° 2015-839 du 9 juillet 2015 sur la sécurisation des rentes

(mis à jour mars 2017)

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L’ordonnance prise par le gouvernement le 9 juillet 2015, faisant suite à la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 (1), prévoit l’obligation de sécuriser une quote-part de l’engagement relatif aux rentes en service au titre des régimes à prestations définies mentionnés à l’article L137-11 du code de la Sécurité Sociale (2) :

  • Cette quote-part est de 50% des rentes en services, dans la limite de 1,5 x le plafond annuel de la Sécurité Sociale, soit 57 060 € en 2015 (ne sont donc éventuellement concernées par ce plafonnement, que les rentes supérieures à 3 PASS = 114 120 en 2015)
  • La sécurisation doit être faite progressivement de 2017 à 2030 :
    • 10 % à la clôture des comptes qui suit immédiatement le 1er janvier 2017
    • 20 % à la clôture des comptes qui suit immédiatement le 1er janvier 2020
    • 40 % à la clôture des comptes qui suit immédiatement le 1er janvier 2025
    • 50 % à la clôture des comptes qui suit immédiatement le 1er janvier 2030
  • La sécurisation peut être faite :
    • Par la souscription d’un contrat auprès d’une compagnie d’assurance, d’une institution de prévoyance ou d’une mutuelle,
    • Par des fiducies,
    • Des suretés réelles ou personnelles.
  • En cas de non-respect de ces nouvelles obligations, l’ordonnance prévoit une pénalité annuelle de 30% de la différence entre le montant qui devrait être sécurisé et le montant effectivement sécurisé.

Elle prévoit par ailleurs :

  • La possibilité, pour les régimes concernés par cette obligation, de changer l’option de contribution (2) : lorsque l’option avait été exercée pour la taxation sur les rentes, l’entreprise peut changer pour une taxation sur le financement si elle externalise l’engagement auprès d’un organisme assureur.
  • L’obligation pour l’entreprise d’adresser chaque année aux Urssaf un état, certifié par ses CAC, faisant apparaître le montant des engagements et celui des garanties afférentes.

ATTENTION : dans sa « QJN » (Question Juridique Nationale) n° 2016-0000014, l’ACOSS indique que, compte tenu du fait que l’ordonnance est entrée en vigueur au 1er janvier 2016, l’obligation déclarative est valable pour tous les exercice clos à partir de cette date et donc également pour l’exercice clos au 31 12 2016 (déclaration à faire avant le 31 03 2017), quand bien même il n’y a, à cette date, aucune obligation de sécurisation. La sanction pour déclaration tardive (distincte de la pénalité de 30% prévue par l’ordonnance pour non sécurisation des rentes) est de 1.5% du PMSS (49,03€ au 31 03 2017) par retraité et par mois de retard.

 

 Les commentaires de SPAC Actuaires

  • Seules les rentes liquidées et en service sont concernées. Aucune obligation ne porte, pour l’instant, sur l’externalisation ou la sécurisation des rentes en cours d’acquisition (pendant la période de constitution).
  • Les régimes pour lesquels l’entreprise « achète des rentes » au moment de la liquidation ne sont pas concernés dès lors que l’entreprise transfert totalement l’engagement à l’assureur au moment de la liquidation. Elle n’a donc plus aucun engagement au titre des rentiers et donc aucune déclaration à faire aux URSSAG. Attention toutefois lorsque la revalorisation des rentes est faite sur un indice exogène à l’assureur (point AGIRC par exemple), l’entreprise conserve alors un engagement à son bilan. La sécurisation ne pose pas de souci mais l’obligation déclarative subsiste.
  • Ce texte ne remet pas en cause les dispositions du V de l’article L137-11 obligeant l’externalisation des régimes mis en place à compter du 1er janvier 2010 (3).

 

Exemple chiffré :

Une entreprise paye directement une rente annuelle de 300 000 € à un de ces anciens dirigeants. L’engagement inscrit au bilan est de 5,3 M€ au 31 12 2015. Au terme de la progressivité, la sécurisation devra porter a minima sur 50 % de la rente, plafonné à 1,5 fois le PASS (soit 150 000 € plafonné à 57 060 € en valeur 2015). L’engagement correspondant, en valeur 2015, serait de l’ordre de 1 M€.

L’ordonnance est toutefois floue sur la progressivité à appliquer. Il nous semblerait logique d’appliquer la progressivité par 5ème au montant devant être sécurisé à terme (interprétation 1 ci-dessous). Toutefois, à la lecture de l’ordonnance, l’interprétation 2 serait possible (application des pourcentages à la rente avant de plafonner à 1.5 fois le PASS), obligeant alors l’externalisation maximale en 2020 et non en 2030. L’avenir nous dira quelle est la volonté du législateur :

Année  Interprétation 1  Interprétation 2 
 2017  1/5ème de (50% de la rente plafonnée à 1.5 fois le PASS) = 11 412 €  10 % de la rente, plafonné à 1.5 fois le PASS = 30 000 €
 2020   2/5ème de (50% de la rente plafonnée à 1.5 fois le PASS) = 22 824 €  20 % de la rente, plafonné à 1.5 fois le PASS = 57 060 €
 2025   4/5ème de (50% de la rente plafonnée à 1.5 fois le PASS) = 45 648 €  40 % de la rente, plafonné à 1.5 fois le PASS = 57 060 €
 2030   50% de la rente plafonnée à 1.5 fois le PASS) = 57 060 €  50 % de la rente, plafonné à 1.5 fois le PASS = 57 060 €

 

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(1) La loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014, « garantissant l’avenir et la justice du système de retraites » dite « réforme Hollande » prévoyait, dans l’article 50, que : « …le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de protéger les intérêts des travailleurs salariés et des personnes ayant déjà quitté l’entreprise ou l’établissement de l’employeur à la date de la survenance de l’insolvabilité de celui-ci en ce qui concerne leurs droits acquis, ou leurs droits en cours d’acquisition, à des prestations de retraite supplémentaire d’entreprise…. »
(2) Article L137-11 du code de la Sécurité Sociale fixe les contribution payables par les entreprises au titre des régimes de retraite à prestations définies conditionnant la constitution de droits à prestations à l’achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l’entreprise (droits aléatoires) et dont le financement par l’employeur n’est pas individualisable par salarié.
(3) La loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2010 avait modifié l’Article L137-11 en y ajoutant notamment le point V qui oblige l’externalisation des régimes mis en place à compter du 1er janvier 2010 : « V.- Les régimes de retraite à prestations définies, mentionnés au I, créés à compter du 1er janvier 2010 sont gérés exclusivement par l’un des organismes régis par le titre III du livre IX du présent code, le livre II du code de la mutualité ou le code des assurances. »Toutefois, aucun décret n’est venu préciser les contours de ce texte : cela concerne-t-il exclusivement la gestion ? Doit-on externaliser tout ou partie de l’engagement ? Avant liquidation ? Après liquidation ? …

En l’état et en l’absence de décret d’application, ce texte nous semble difficilement applicable.